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de A à Z, le monde en musiques


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Singapore a-go-go (Sur la platine – Février 2010 – IV)

Singapore a-go-go (Sublime Frequencies)

Difficile parfois de classer des disques… Dans le cas de ce cd, c’est de la musique “du monde” mais très peu de la musique traditionnelle. Quoique. Contrairement à bien d’autres musiques, il y a des références, des sonorités très chinoises, une manière de chanter et même un recours à des morceaux traditionnels comme la plage 2, Tall mountain green.

Mais revenons au contexte, que je reprends des notes de la pochette. Ce disque propose des chansons pop de Singapour datant d’un période assez limitée, entre 1963 et 1975.  Contrairement à la Chine Populaire, la diaspora chinoise en Asie du Sud-Est était exposée aux influences occidentales, via les GI américains et des radios comme Radio Free Asia mais elle connaissait également la musique traditionnelle (l’opéra de Pékin notamment) ou la pop de Shanghai des années 30. L’économie était florissante: les musiciens pouvaient s’acheter des guitares et des orgues électriques et les jeunes achetaient des tournes-disques et des disques. Et tandis que les Chinois de Chine chantaient en chœur des chants de travail, la diaspora créait la pop ! Singapour devint le centre de la production et le style fut connu sous le nom de “a-go-go” ou “off-beat cha-cha”.

Beaucoup de petits labels sortaient des disques de nombreux chanteurs et chanteuses qui changeaient souvent leur nom de scène et s’accompagnaient des mêmes groupes, dont les Stylers est un des plus connus. Les chansons s’inspiraient de diverses sources, d’airs traditionnels, de films, de la Canto-pop, du rock ‘n’ roll occidental.

L’arrivée de la cassette audio marqua la fin de cette ère, le piratage devenant trop facile…

Les personnes qui me connaissent un peu ne seront pas étonnées de m’entendre dire que j’aime beaucoup ce disque. Je m’intéresse beaucoup à la manière dont les musiques pop occidentales ont été intégrées dans des traditions locales pour créer des genres à part entière. La musique cambodgienne de la même époque est un autre bon exemple. En dehors de ça, Sublime Frequencies nous propose ici une compilation dont les morceaux sont bien choisis, variés en style, drôles parfois (Mimi Cat) et qui sont le reflet de toute une époque. (Extraits en écoute ici) Ma note: 8,5/10

Si vous aimez ce style de musique, je peux vous conseiller plusieurs sites et blogs: Questing bandstand (musiques pop des années 60 d’Asie de l’Est et du Sud-Est), un article de Tofu Magazine (scène musicale de Hong-Kong, Macao et Singapour, 1964-69), Radiodiffusion (musiques pop sixties d’Afrique et d’Asie, une série d’articles sur Singapour) et pour une introduction et beaucoup de liens, Psychemusic.


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Omar Souleyman, de star pop syrienne à un hype international ?

Espoir musical de l’année selon le NME (5e sur 50 places !), une page complète à son propos dans les Inrockuptibles, Omar Souleyman est sans conteste la nouvelle star des milieux hype. Découvert par le label américain Sublime Frequencies, l’artiste syrien a récemment fait une tournée européenne dans des clubs plutôt orientés rock, subjuguant les auditeurs par des sons assez rudes et plein de distorsion, par des rythmes primitifs et frénétiques peu connus à leurs oreilles, par des synthétiseurs criards et boîtes à rythmes cheap. Mode passagère, besoin d’exotisme, de sonorités venues d’ailleurs, différentes de la musique latino ou des percussions africaines qu’on nous bassine à longueur de journée ? Oui, sans doute. Mais pourquoi cette star locale syrienne et pas l’idole vietnamienne ou le crooner somali ? Pourquoi Omar Souleyman et pas un des nombreux autres artistes du même style qui voyagent de village en village pour animer les célébrations diverses ou un de ces chanteurs qui comme Ali Aldik renouvellent les traditions du dabke.

Il ne faut certainement pas jeter la pierre à Sublime Frequencies qui depuis quelques années édite des musiques issues de cassettes locales, souvent inédites (Cambodge, Myanmar, Iraq…), ou des collages de radios du monde (Corée du Nord, Maroc…). Il ne faut également pas sous-estimer la musique d’Omar Souleyman. Star dans son propre pays, il s’inspire des traditions kurdes et turques, du choubi irakien et du dabke, une musique de fêtes et de mariages qui se danse en cercle et qu’on retrouve dans tout le Levant, du Liban à la Syrie. Son origine vient d’un rythme de travail, celui du piétinement du torchis pour fabriquer les toits des maisons. Au Liban dans les années 60, les frères Rahbani ont popularisé le style en composant de nombreux morceaux pour Fairuz et l’ont élevé au rang de musique nationale ou presque, créant des spectacles de grande envergure avec danses assez spectaculaires.

Quant au disque d’Omar Souleyman, écoutez-le pour ce qu’il est, appréciez-le à sa juste valeur c’est à dire une musique locale, avec ses défauts, un peu kitsch parfois mais possédant une énergie assez incomparable. Et n’oubliez pas qu’il y a plein de découvertes à faire dans d’autres pays du monde !